Des lascars hilarants en gays touchants
Par Valérie Parlan, le dimanche 13 novembre 2011
Par Valérie Parlan, le dimanche 13 novembre 2011
HUMOUR. Les Lascars Gays abordent, dans un show décapant, le délicat sujet de l’homosexualité dans les banlieues.
La banlieue et l’homosexualité : deux ghettos(Source: La bande à Ruquier)
« Etre un lascar et un gay, c’est un peu la double peine. Il nous a fallu trouver le ton juste pour rire de ces deux ghettos que sont la banlieue et l’homosexualité. » Ces gros bras au grand cœur, révélés par Laurent Ruquier, jouent à Paris jusqu’en décembre.
Le metteur en scène Luc Sonzogni le savait dès le départ. Traiter avec humour des tribulations d’un couple gay du 9.3, c’était forcément « bouleverser les codes et les a priori. » Un pari qui a effrayé quelques programmateurs.
« On n’est pas là pour caricaturer, moraliser »
Mais sans relâche, les deux humoristes Hugues Duquesne et Majid Berhila ont relevé le défi. Depuis la naissance des personnages des Lascars gays en 2009, Hugues, alias Steeve et Majid, alias Ryan, racontent aux quatre coins de la France le quotidien de deux p’tits gars de banlieue. « Beaucoup redoutaient qu’on tombe dans le côté grandes folles des cités, raconte Majid. Mais on n’est pas là pour caricaturer, moraliser. »
Son compère renchérit : « On sait que c’est une vraie souffrance pour certains d’être homo en banlieue, comme ça peut l’être à la campagne. Alors, par l’humour, on va à l’encontre des préjugés. Au-delà, le spectacle raconte plus largement les travers de notre société. »
Des lascars qui se draguent, se bisouillent et s’aiment, oui, mais Ryan et Steeven campent avant tout des citoyens bousculés et pantois devant un monde qui déraille.
Médiatisés à la télé par Laurent Ruquier
Depuis qu’ils tournent et ont été médiatisés par Laurent Ruquier dans son émission On n’demande qu’à en rire, « jamais on n’a été taxé d’en faire trop ». Dans les salles de spectacle, homos, hétéros, banlieusards, citadins, catholiques ou musulmans, « on n’a jamais ressenti d’animosité de qui que ce soit », se rassure Majid. Le magazine homosexuel Têtu a même salué « un spectacle frétillant et édifiant ».
C’est sans doute là que se niche le talent de ces jeunes humoristes. En secouant énergiquement dans un grand shaker autant de sujets détonants, Steeve et Ryan produisent un jus aigre-doux, loin du goût rance de la stigmatisation facile.
D’Édith Piaf à Lady Gaga
Pendant une heure de show, certains sketches tirent sur la ficelle des clichés. Mais ça rebondit aussi sec. « C’est ce qui est sympa avec eux, s’enthousiasme Marie, venue les applaudir. Quand c’est téléphoné, ils sentent vite le creux et ça repart sur une blague hilarante. C’est un spectacle qui bouillonne, joue beaucoup avec son public. »
Cette ébullition, Hugues et Majid l’entretiennent. Les lascars aiment bavasser de tout et de rien et se marrent aussi en se trémoussant et en poussant la chansonnette. Cet arrière plan de comédie musicale décalée offre des tableaux croustillants. Piaf, Lady Gaga, NTM et Village People dans le même panier, fallait oser.
Une interview exclusive des Lascars Gays!
Par Audrey Privato, le 23 mars 2011
Les Lascars Gays, Ryan (Majid Berhila) et Steve (Hughes Duquesne) forment un duo comique qui cartonne à Paris, tant au théâtre (Le Clavel) qu’à la télévision (France 2, « On ne demande qu’à en rire »). Leur spectacle « Bang !Bang ! » s’arrêtera en Belgique au mois de juin. C’est l’occasion de découvrir ces deux comédiens qui ne se prennent décidément pas la tête et vannent, tant sur scène que dans la vie.
Comment vous est venue cette idée de mettre en scène des « Lascars Gays » ?Hughes : En fait, ça vient d’une rencontre. On était dans une soirée avec Majid et il y avait un type, un peu genre « bad boy » qui n’arrêtait pas de nous fixer. C’était bizarre. On a vraiment cru qu’il voulait nous casser la figure, c’était chaud comme ambiance ! Puis on l’a revu à une autre occasion, il est venu nous parler et là on s’est rendu compte qu’en réalité, il nous draguait ! On a discuté, il nous a fait rire et puis on s’est décidé à en faire un spectacle.
Vous êtes sold-out en permanence à Paris, et quasiment toute la tournée est complète également. Vous pensez que c’est dû à votre participation à l’émission de Laurent Ruquier ?Majid : En partie oui. Mais on fonctionnait bien avant aussi! Disons qu’au lieu d’être complet le jour même, là c’est plutôt un mois ou deux à l’avance.
Pour le moment, vous cartonnez chez Ruquier (plus de 30 passages), les spectateurs vous adorent mais le jury, composé notamment de Jean Benguigui et Catherine Barma, a récemment pointé un certain essoufflement…Majid : C’est vrai. Mais les gens ne se rendent pas compte : être aussi drôles et inventifs, c’est un exercice très dur. Le rythme est soutenu : on fait un ou deux sketches par semaine et ils durent en moyenne 5 à 6 minutes. Et puis tous les comiques connaissent une baisse de régime à un moment. Si on prend Jonathan Lambert (chroniqueur humoriste de l’émission « On n’est pas couché ») par exemple : certaines de ses apparitions sont à mourir de rire, d’autres… moins. Ça arrive. Mais nous on a les notes du jury pour nous recadrer.Hughes : Et puis les sketches, c’est du boulot. Les répétitions, l’écriture. Tout ça prend beaucoup de temps. On réfléchit sans arrêt à ce qu’on va faire.Majid : A un moment, chez Ruquier, ils voulaient qu’on soit plus dans le « hapenning » (faire intervenir d’autres personnes dans les sketches, d’autres humoristes notamment). Et puis, comme Catherine Barma aime beaucoup les gags visuels, on a aussi travaillé l’une de nos apparitions comme ça (« Le sumo »). Maintenant, ils nous disent qu’ils préfèrent nous voir dans le sketche. Donc maintenant on se recentre là-dessus. On ne peut pas tout faire en même temps.
Comptez-vous rester sur France 2 ou bien avez-vous d’autres projets en vue ?Majid : On a un tas de projets mais c’est vrai qu’on a envie de rester sur France 2. On pense à lancer une chronique du style « Un gars, une fille ». Sauf que ce serait « Un gars, un gars », (rires). On a aussi un projet de BD avec un dessinateur belge et on pense à un long métrage.Hughes : Cela dit, continuer à avoir du succès avec le spectacle actuel c’est important pour nous. Nous sommes actuellement en discussion pour nous produire dans une salle parisienne plus grande à la rentrée. Et puis il faudra penser au deuxième spectacle, ce qui est déjà énorme.
Vous venez en Belgique du 7 au 11 juin prochain, qu’est-ce que cela vous évoque, la Belgique ?Hughes : Euh… les bonnes frites (rires). Mais pas que ça, la Belgique c’est aussi de grands acteurs, comme Benoît Poelvoorde ou François Damiens. Et puis j’ai des origines belges du côté de mon père.Majid : Oh c’est un peu péjoratif mais moi, je pense aux sauces. Vous avez de ces sauces pour vos frites… (regard alléché). Parfois, avec des potes, on allait jusque Bruxelles juste pour se chercher un sandwich ! Bon on se baladait après hein… J’aime la Belgique.
Vous prévoyez d’adapter un peu le spectacle au public belge ?Majid : Oui, bien sûr. Mais c’est une surprise…
(Source: Mediaddict)
Coulisses: Droit de cité pour les Lascars gays
Le jeudi 16 décembre 2010
Le temps d’un spectacle frais et plein d’humour, Majid Berhila et Hugues Duquesne se fondent dans la peau de Ryan et Steeve, deux potes homos qui vivent dans une cité… Ouvertement militant, “Bang Bang” prône le droit à la différence et le vivre-ensemble. Par Habibou Bangré
Un banc et deux lascars, casquette vissée sur la tête, tous caleçons dehors. Steeve se sent d’humeur scientifique. Avec force détails, il explique à Ryan la tectonique des Blacks. Et puis Ryan lance un pavé dans la mare : “J’suis plus musulman maintenant, c’est trop dangereux !” C’est décidé, il sera chrétien. “Ryan est perdu, c’est un garçon qui se cherche, commente Majid Berhila, qui campe ce personnage. Mais il est ouvert et essaie. Si ça fonctionne, il garde. Et si ça ne fonctionne pas, il passe à autre chose !” Valable aussi pour les garçons. Steeve et Ryan sont gays. Mais officieusement. Ils vivent dans une cité où il ne fait pas bon être homo…
Fibre militanteAlors forcément, les baisers sont furtifs, les relations discrètes. Reste que quand le cœur fait boum les deux lascars gays sont mielleux, fleur-bleue… Et plus encore. Ils vivent eux aussi la jalousie, le manque d’assurance, le mal d’amour… Comme les hétéros ! “Qu’on soit homo ou hétéro, on a exactement les mêmes problèmes et les mêmes rapports. La différence, c’est juste que ce sont deux personnes de même sexe, c’est tout !” plaide Majid Berhila, 30 ans, d’origine marocaine.Attention. La fibre militante de Bang Bang ne se limite pas à l’homosexualité. “A travers ces deux ghettos, la cité et l’homosexualité, on arrive à faire passer bien d’autres messages,” précise Hugues Duquesne, également trentenaire. Sur une sélection éclectique et entraînante de DJ Emir, les comédiens abordent la guerre en Afghanistan ou, en France, l’identité nationale, les expulsions, les tests ADN… Une politique migratoire symptomatique de la présidence de Nicolas Sarkozy.“Bien sûr que ça nous gêne, que des gens soient expulsés, on n’est pas forcément d’accord avec la politique du gouvernement, indique Hugues Duquesne, d’ascendance hispano-polonaise. Mais le but du jeu c’est de détendre. Avec l’humour, on espère pouvoir faire réfléchir.”
Machine en marcheBang Bang, mis en scène par Luc Sonzogni, monte en puissance. Frais, chaleureux et sensible, il a remporté le prix du jury et le prix du public du Festival du rire de Cavaillon en 2010. Bon accueil aussi lors des éditions 2009 et 2010 du Festival d’Avignon. Et après une première saison timide au théâtre Trévise, le public parisien afflue désormais au théâtre Clavel. Dans la salle, c’est un camaïeu de couleurs, religions, générations…“Personne ne nous a arrêtés pour dire : ‘Espèce de bâtard, tu joues les lascars gays, t’as pas honte ?’ On n’a pas eu d’agression physique, de menace, rien. Je trouve que c’est quand même une avancée”, affirme Majid Berhila. Mais les détracteurs existent.Toujours est-il que la machine est en marche. Bang Bang pourrait bien passer à d’autres planches, celles de la BD. Sans compter des projets de court-métrage pour la télévision. “Comme Un gars, une fille, sauf que ce sera Un gars, un gars”, explique Majid. De quoi renforcer le message : “Arrêtez de vous prendre la tête et de juger sur les apparences, vivez ensemble !”
(Source: Le courrier de l'Atlas)
«Bang Bang»: Les Lascars gays se jouent des préjugés
Par Jeanne Samak, le samedi 09 octobre 2010
Une pièce de théâtre qui aborde la douloureuse question de l'homosexualité en banlieue en passant par le rire et les délires musicaux. Frétillant et édifiant.Sur scène, deux gars de banlieue. Ils sont homos, apprend-on et très vite, on sent pointer la question du terrible combat identitaire qui doit les déchirer au quotidien. «Etre lascar gay, c'est une peu une double peine», explique Luc Sonzogni, le metteur en scène. Mais le pari, c'est que, pas une seule fois durant toute cette pièce hilarante, on n'aborde ce sujet de manière frontale.«C'est un sujet très sensible, poursuit Luc Sonzogni. Si on l'avait pris au premier degré, ça aurait été très difficile de faire venir le public». A la place, Steeve et Ryan (interprétés par les talentueux Hugues Duquesne et Ryan Majid Berhila, également auteurs de la pièce) refont le monde - leur monde. Ça parle de trafic de poppers et de la chaîne nébulaire des chevaliers du zodiaque. Ça lance une spéciale «dédic-ass» à tous les lascars, «pauvres ou riches, actifs ou passifs». Et à la différence des autres jeunes de banlieue, ça adore les fouilles au corps menées par les flics. Sans oublier le décryptage de l'actu: «Le pape, c'est un gars qui porte des robes parce qu'en fait, il s'moque du regard des autres.
«Deux ghettos»( Source: TÊTU )
Mais ce qu'on préfère, c'est voir ces types en baggies et casquettes à l'envers se toucher les tétons en dansant sur Like a Virgin. Et offrir au public frétillant (oui, frétillant) une battle de musique avec chorés assorties: Garou contre NTM, «Toxic» contre «T'es une Tasspé». Une dualité qui en dit bien plus que n'importe quel discours sur la difficulté d'être gay en banlieue aujourd'hui. «A travers ces deux ghettos, l'homosexualité et la banlieue, on fait passer plein de choses», commente Hugues Dusquene. Les Lascars Gays ont cartonné à Avignon en 2009 et 2010, et toute l'année passée à Paris. Et c'est pas près de s'arrêter.
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